Rage

25 nov. 2019

Neuf heures cinq. L'écureuil cavale sur la pelouse. Dans la salle 16, Mme Underwood donne son cours d'algèbre... "Si l'on augmente le nombre de variables, les axiomes eux-mêmes restent valides..."

L'interphone crache alors une giclée de mots-requins. Charles Decker est convoqué chez le directeur...

Neuf heures vingt. Après un entretien destroy, Charly met le feu aux vestiaires. Dans les marais puants de son subconscient, son dinosaure personnel patauge avec rage. Charly ouvre la porte de sa classe, tire sur son prof, qui s'effondre. Exit. Tuée sur le coup. Charly se sent merveilleusement bien. Il est allé jusqu'au bout...

Neuf heures cinquante. Océan de silence dans la classe prise en otage. Charly se prépare pour le sprint final. Psychodrame et lavage de cerveau. Tout le monde va passer à la moulinette...

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Rage de (Richard Bachman) Stephen King
Titre original : Rage - Traduit par Evelyne Châtelain
Editions J'ai Lu, 1995 - 251 pages


: /

 : La manière dont l'auteur fait parler ces ados perdus.
Ce qui en ressort est aussi dérangeant qu'humain.


Rage est un roman qui a été malheureusement souvent lié aux tueries dans les lycées aux États-Unis. Au point que Stephen King a souhaité en arrêter la publication. Je trouve qu'il est tout aussi délicat qu'important d'en parler. Sur le sujet, j'ai lu 54 minutes de Marieke Nijkamp, il y a pratiquement deux ans jour pour jour. Et, je peux vous dire que je me souviens bien des frissons qui m'ont accompagné du début à la fin. C'est un sentiment d'horreur et d'incompréhension. Et, en même temps, une envie d'essayer de comprendre comment un être humain peut vriller à ce point...

Charly est convoqué dans le bureau du directeur et se fait renvoyer, suite à une affaire qui reste assez floue au début. Sans sembler l'avoir réellement prévu, il se dirige vers son casier auquel il met le feu après y avoir récupéré l'arme de son père. Suivent un silence, puis des rires plein de tension et d'incompréhension face à leur camarade qui vient de tuer deux de leurs profs et qui leur affirme vouloir discuter. Enfermé dans la salle de classe, Charly raconte certains de ses souvenirs familiaux, fait parler ses camarades et s'amuse à briser les adultes qui essaient de communiquer avec lui. Cela, sans bien savoir pourquoi... Si je savais ce qui me pousse à faire ça, je serais sans doute pas obligé de le faire.

Certains passages sont glaçants... Pas forcément ceux auxquels on pourrait penser en lisant le résumé. Stephen King, comme il sait si bien le faire, nous dépeint des enfants et ados paumés. La vie, les études, la famille, les amours, etc. Ce n'est pas le coup de folie de Charly qui est mis particulièrement en avant. C'est pourquoi il en est arrivé là. Pourquoi lui et ses camarades doutent et semblent en équilibre permanent. Voilà le plus triste et effrayant dans ce roman.

"La folie, c'est quand on ne voit plus les coutures qui font tenir les différentes parties du monde ensemble."

Si on parle de tension "brute" ressentie, 54 minutes m'aura davantage marqué. Si on se concentre sur la psychologie des personnages, sur ce qui est mis en place petit à petit jusqu'au point de rupture, Rage sort du lot. L'histoire étant à la première personne, nous suivons le tout du point de vue de Charly, ce qui nous permet de "comprendre" son état d'esprit. Pas de cautionner ses agissements, bien entendu. Un huis clos qui nous garde dans cette classe jusqu'au bout.


En quelques mots...
Lycée | Placerville | Adolescent.e.s | Prise d'otages | Confidences

Commentaires

  1. Il y a longtemps que je veux le lire.
    Un peu dans la même veine, j'avais lu 54 minutes, que tu mentionnes.
    Un roman super fort !

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  2. Effectivement l'intrigue fait penser à 54 minutes. C'est dommage de justifier de telles actes sur la seule mention d'un livre au point d'en arrêter la publication. Surtout qu'au jour d'aujourd'hui, il en existe de nombreux autres. Et oui, cela dépend de la fragilité d'esprit de la personne qui lira le livre

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    1. Je suis totalement d'accord. L'auteur n'incite, bien évidemment, à aucun moment les jeunes à passer à l'acte. Au contraire, grâce à la manière dont il en parle, il dénonce le pourquoi de cela.

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  3. Pffioou rien que lire ton avis me colle des frissons !
    Je sais, je le répète à chaque fois, mais il faut vraiment que je prenne le temps de me pencher sur le King ! =)

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  4. Je n'ai encore jamais lu de titres écrits sous son pseudonyme de Richard Bachman, mais j'en ai bien l'intention ;)

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    1. Mon tout premier King était écrit sous ce pseudo :) Probablement pas le meilleur, mais j'avais beaucoup aimé : Blaze.

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  5. Et bien voilà un King que je ne connaissais pas, je suis en train de faire ma petite collection de ses livres :)
    Merci pour la découverte ! bonne soirée

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    1. De rien !
      J'essaie aussi de mettre la main sur le maximum de ses romans. Ils se trouvent assez facilement en occasion ou dans les boîtes à livres, c'est cool.

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  6. J'aime beaucoup ton billet. Je ne connais pas 54 minutes, mais je te retrouve vraiment sur la façon dont le roman est abouti psychologiquement. Un court roman glaçant en effet.

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    1. Stephen King est toujours aussi doué pour marquer les esprits.

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Merci beaucoup pour votre passage par ici et votre commentaire ♥